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Un premier pas lucide et courageux qui en appelle d’autres

Ce dimanche, le peuple neuchâtelois a renvoyé les autoproclamés éolo-sceptiques à leurs études. Le score ne souffre aucune discussion et il me plaît de rappeler qu’en 2010 déjà des états généraux de l’énergie avaient été initiés par le Conseiller d’Etat alors en fonction.

En page 28 du document intitulé “opinion des Neuchâtelois sur les questions énergétiques“, on découvrait que 64% des sondés souhaitaient que l’on développe “beaucoup”, selon les termes du sondage, l’énergie éolienne.

 

Ne trouvez-vous pas cela vraiment étonnamment proche des 65% d’acceptation du contre-projet du Grand Conseil atteints ce dimanche?

Il n’y a pas de hasard ici la population neuchâteloise appelle de ses vœux une sortie ordonnée des énergies fossiles, nucléaires compris, et est prête, de manière tout à fait consciente, à mettre en œuvre une politique permettant la concrétisation de ce but. Si on devait exprimer un regret aujourd’hui, c’est bien pour ces 4 années perdues (2014-2010) à confirmer quelque chose que l’on savait donc déjà politiquement parlant, et que, sur le plan scientifique, on sait être dramatiquement urgent.

Aujourd’hui ce premier pas se mesure à l’étalon d’un pourcentage un peu abstrait soit les 20% de production indigène potentiellement atteignables grâce aux parcs prévus.

Ne réfléchissez pas plus longtemps pour le second pas, vous le lisez dans la même page 28 du sondage ci-dessus. En premier choix, les neuchâtelois à 79% plébiscitaient l’énergie solaire comme source prioritaire d’énergie renouvelable.

Nous devons maintenant cesser de tergiverser et le plus vite possible lever une bonne fois pour toutes les obstacles artificiels mis en travers de l’énergie solaire par des défenseurs auto-proclamés du patrimoine qui sont en réalité surtout des fossoyeurs de notre environnement et de celui de nos descendants.

Avec le solaire libéré, nous pouvons avancer de 30% supplémentaires. Les deux pas mis bout à bout, nous aurons donc déjà fait la moitié du chemin. Pour ma part je préférerai voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide, en conservant bien sûr la ferme volonté de finir de le remplir avec les très nombreuses sources d’énergies vertes à notre disposition.

Laurent-David JOSPIN

Sources :
Rapport M.I.S. Trend, novembre 2010, “opinion des Neuchâtelois sur les questions énergétiques
©AFP / 13 avril 2014, “Climat: urgence à agir pour tenir le cap des 2°C, l’énergie au coeur du défi

Une fois pour toute, non le nucléaire ne peut pas être une solution!

Les débats liés à la votation sur l’éolien dans le canton de Neuchâtel ont fait ressortir du bois quelques personnes voulant, ouvertement ou sournoisement, un retournement de la décision de sortir du nucléaire avec presque toujours les trois mêmes arguments :
– Les renouvelables sont trop chers
– On n’arrive pas à gérer l’intermittence
– Il n’y aura pas assez d’énergie pour tous

De manière regrettable, ces personnes refusent, à l’encontre du bon sens, cette sortie du nucléaire et cherchent, en torpillant toute autre alternative (le solaire hier, l’éolien aujourd’hui, et qui sait la bio-masse demain?), à nous mettre dans une impasse énergétique pour contraindre la population à un choix qu’elle ne souhaite manifestement pas.

Mes convictions sont connues et je ne céderai pas à la tentation de refaire tout le débat pro et anti nucléaire.

Un seul argument, indépendamment des questions des déchets laissés aux générations futures, du démontage impossible des centrales en fin de vie, des coûts sous-évalués, des problèmes sanitaires, …. permet de démontrer une fois pour toute que le nucléaire ne nous garantit certainement pas, d’avoir assez d’énergie, et encore moins de l’avoir bon marché.

Nous avons actuellement sur la planète 435 centrales nucléaires en fonctionnement ainsi que 72 en construction effective. Il y a également un certain nombre de projets à des stades plus ou moins avancés. La notion même de projet ne permet pas d’en déterminer le nombre exact, toutefois les experts de la branche reconnaissent qu’environ 100 projets sont crédibles et soutenus par une volonté réelle d’aboutir à relativement court terme. Théoriquement, nous pourrions donc atteindre 600 réacteurs nucléaires sur la planète. (note : les chiffres ci-dessus sont vrais à la date de rédaction, pour avoir des chiffres exacts lors de votre lecture, il faut consulter les sources mentionnées en fin de post).

En 2012, 54’610 tonnes d’uranium ont été produites, et très étrangement presque 70’000 tonnes consommées. Cette anomalie dure, de plus, depuis de très nombreuses années (au minimum 2005 et très vraisemblablement depuis 1991 selon certaines sources). Bien évidement, la différence est comblée par l’utilisation de stocks disponibles. Et c’est là que la chose se corse, car on parle ici de stocks militaires déclassifiés relativement limités. Un stock aussi profond soit-il,  ne pourra jamais rivaliser avec une corne d’abondance, et un jour, “l’entrepôt” sera vide.

Or ce jour est déjà là, depuis ce printemps 2014, dans le cadre de l’accord UHE-UFE, autrement appelé mégatonne contre mégawatt, sur 20 ans signé en 1994 entre les USA et la Russie, cette dernière a cessé d’envoyer de l’uranium à usage civil provenant du recyclage de son uranium militaire excédentaire.

En imaginant donc que nous montions à ces 600 réacteurs nucléaires au plan mondial, nous aurions une consommation annuelle approchant 100’000 tonnes (prenant en compte que la mise en première charge d’un réacteur nucléaire est 3 fois plus importante que la consommation annuelle, et également que les nouveaux réacteurs potentiels auraient des puissances moyennes supérieures à celles du parc installé).

On en vient donc rapidement à la seule vraie question : sera-t-il possible de doubler la production mondiale pour satisfaire la demande dans un délai de quelques courtes années? Je me permet d’en douter fortement pour ne pas dire plus.

Les pro-nucléaires ont beau jeu de nous dire qu’il y a encore de l’uranium pour x centaines d’années sur la planète. La réalité de base est tout autre, car personne ne veut une mine chez soi! Un regard sur le cas d’Arlit au Nigeria donne un éclairage particulièrement brutal sur la question. Les poussières radioactives dégagées par l’exploitation de la mine tuent (par des cancers des voies aériennes prioritairement) à des dizaines si ce n’est des centaines de km à la ronde. En réalité l’exploitation d’Arlit est imposée aux populations locales par un pouvoir central tout sauf démocratique. Sans cette contrainte, vous pouvez très certainement oublier cette mine faisant partie des plus productives au monde.

D’autres aspects rentrent en ligne de compte, comme par exemple le taux de concentration dans la source considérée. On nous dit souvent qu’il suffit de s’adresser aux vendeurs de phosphates, car il y a de l’uranium dans cette ressource hautement exploitée actuellement pour les besoins de l’agriculture intensive. Oui, mais voilà, en imposant à l’ensemble des producteurs mondiaux de phosphate les équipements nécessaires pour concentrer cet uranium (avec pas mal de difficultés et coûts à la clef), on arrive péniblement à 3’100 tonnes par année, soit même pas 10% de la quantité supplémentaire recherchée.

Ces problèmes de concentration touchent aussi des mines classiques potentielles qui ne sont absolument pas rentables compte tenu du besoin énorme en énergie pour réaliser une concentration à 5% d’U235 nécessaire pour la plupart des réacteurs civils.

En conclusion, la loi de l’offre et la demande s’appliquant avec force ici conduira tout naturellement à une explosion des coûts du “carburant” uranium, qui compte aujourd’hui pour environ 5% du coût officiel du kWh généré par une centrale nucléaire. Comme une centrale existante représente en premier lieu un montant initial d’investissement bloqué colossal (ordre de grandeur 6 mia d’EUR et + pour les EPR actuellement en construction), l’exploitant sera prêt à payer son combustible presque n’importe quel prix, pourvu qu’il ne soit pas obligé de mettre à l’arrêt son équipement.

Si l’on prend en compte un coût potentiel de l’uranium à 1000 US$/kg au lieu des 40 actuels, et sans même inclure les coûts liés à une réparation du problème sanitaire généré sur les lieux de production, on peut s’attendre jusqu’à un triplement du coût de l’énergie produite.

On constate dès lors clairement que, dans les années à venir, le nucléaire ne nous garantit ni de l’énergie en quantité ni même un prix bas.

Les personnes croyant qu’en sabotant tout ce qu’elles peuvent du coté des ENR, elles permettront un retour en force du nucléaire, sont tout simplement de dangereux irresponsables!

Le peuple neuchâtelois a la chance de pouvoir montrer la voie, je veux croire qu’il saura prendre cette opportunité. Nous avons urgemment besoin des 20% que les éoliennes peuvent nous offrir pour aller en direction de notre autonomie énergétique. Non à l’initiative “Avenir des crêtes”, Oui au contre-projet du Grand Conseil!

Laurent David Jospin

Sources :
Agence internationale de l’énergie nucléaire, www.iaea.org/pris/
Commissariat à l’Energie Atomique, http://www.cea.fr/content/download/4853/28969/file/clefs55_p017_022_Capus.pdf
International Physicians for the Prevention of Nuclear War, http://www.ippnw-students.org/Japan/Arlit.pdf

Fermer la porte de l’éolien ouvre celle du gaz de schiste!

Plusieurs de mes connaissances se sont étonnées du fait que je m’engage pour la votation liée à la question éolienne agitant le lanterneau politique neuchâtelois. Plusieurs fois l’on m’a interpellé en exprimant une incompréhension globalement résumable en “pourquoi un vendeur de solaire voudrait favoriser une énergie concurrente?

Il s’agit d’une erreur essentielle que je souhaiterais corriger ici. Le solaire, l’éolien, le biogaz, les autres formes de biomasse, la géothermie quand elle est faisable sans risque, l’hydraulique sous toutes ses formes, ne sont pas, au grand jamais, des énergies concurrentes mais des partenaires se complétant et se renforçant les uns les autres.

Le solaire présente un cycle jour-nuit évident, dont beaucoup oublient qu’il colle assez bien au cycle de l’activité humaine et donc aux besoins en énergie. L’éolien offre fréquemment des puissantes productions en période de mauvais temps. La biomasse et l’hydraulique ne sont ni plus moins que nos batteries permettant le lissage des productions intermittentes. Et ainsi de suite, dès lors n’opposez pas des frères et sœurs ne souhaitant qu’une seule chose collaborer!

Peu de gens le savent, mais une combinaison photovoltaïque + éolien permet de produire de l’énergie pendant presque 90% du temps.

Pour l’exprimer autrement vouloir couvrir l’intégralité de nos besoins avec une seule source d’énergie renouvelable relève de l’impossible car la gestion de l’intermittence devient insoluble. Atteindre le même objectif avec deux sources différente au lieu d’une reste difficile et coûteux, mais peut s’envisager. Lorsqu’on passe à trois ou encore mieux quatre, les renouvelables s’intègrent en un tout cohérent sans difficulté supplémentaire, car rappelons-le, même le nucléaire pose de grandes difficultés pour gérer les variations de demande du réseau.

Mon engagement auprès du comité pro-éolien relève donc de la simple cohérence.

Une plongée dans la campagne liée à cette votation ne parle pas franchement en faveur du genre humain entre la désinformation, les mensonges et les insultes très largement en-dessous de la ceinture. Il m’est apparu souhaitable d’essayer de recadrer le débat et j’ai donc essayé de collecter l’ensemble des contre-vérités en circulation et d’offrir à chaque point la base de réponse permettant de s’y retrouver.

Le lien sur le résultat est à la fin de l’article, à diffuser le plus généreusement possible, merci d’avance.

Je trouve par contre important de souligner encore une fois ce que j’expliquais au journaliste du Temps à la fin de la conférence de presse: “fermer la porte de l’éolien ouvre celle des gaz de schiste“.

Notre économie, notre mode de vie, et enfin l’ensemble des prestations sociales offertes à la population exigent tous de l’énergie! Nous avons besoin des 20% que l’éolien peut nous offrir. Faire l’impasse ici nous conduira tout droit dans une situation d’urgence dans quelques années et l’autoroute du gaz schiste aura été soigneusement balayée avec toutes les conséquences désastreuses à la clefs déjà décrites dans ces pages.

En parallèle à ceci, il se rajoute un puissant malaise sur l’honnêteté des défenseurs de l’initiative “avenir des crêtes” lorsqu’ils affirment qu’il faut privilégier l’énergie solaire, car voyez-vous plusieurs de ces personnes appartiennent au groupe qui fait des pieds et des mains pour retarder mes projets de centrales photovoltaïques à La Chaux-de-Fonds.

Oui, la population doit savoir que l’éolien et le solaire ne s’opposent pas mais se renforcent, et que les affirmations contraires de nos adversaires relèvent de la même logique égoïste, court-termiste et mensongère nous amenant tout droit vers l’enfer. Il vous suffit de prendre connaissance des communiqués du GIEC sortant au moment même où j’écris ces lignes!

Laurent-David Jospin

Liens et sources :
Journal Le Temps, Pierre-Emmanuel Buss, “La centrale à gaz de Cornaux, un projet mort-né
Argumentaire rectificatif sur les contre-vérités en circulation: http://www.famillejospin.ch/ouvrirlesyeux/images/rectificatif%20pro%20%c3%a9olien%20.pdf
Site de l’association de défense du contre-projet du Conseil d’Etat: www.eole-ne.ch
Agence France Presse, communiqué du GIEC, “Climat: urgence à agir pour tenir le cap des 2°C, l’énergie au coeur du défi
Posts sur le gaz de schiste et leurs sources propres: http://www.famillejospin.ch/ouvrirlesyeux/?p=109, http://www.famillejospin.ch/ouvrirlesyeux/?p=93,

Not in my backyard

Aujourd’hui la population de Daillens et Oulens dans le cadre d’un vote consultatif a refusé l’implantation de 10 éoliennes le long de l’autoroute.

C’est toujours la même histoire, tout le monde est pour les énergies vertes mais chez les autres! Cette façon de procéder nous conduit droit dans le mur, il faut en être conscient. La conséquence la plus prévisible est que nous serons contraints d’aller acheter l’énergie chez nos grands voisins, par exemple auprès des grands parcs éoliens du nord de l’Allemagne (avec tout de même à la clef une montagne de pylônes sur 2500 km pour amener l’énergie chez nous). Il en résultera en cascade une dépendance de notre pays envers l’étranger, qui tôt ou tard nous coûtera cher, si ce n’est très cher, sur le plan politique et de notre indépendance en général.

On ne peut certainement pas m’accuser d’être un pro-éolien puisque notre entreprise développe spécifiquement des projets photovoltaïques (comme l’autoroute solaire), mais voilà je ne peux pas m’empêcher de penser que tout cela est dramatique pour nos générations futures. Un peu moins d’égoïsme et un peu plus de lucidité, est-ce trop demander?

L’image est célèbre, mais voilà elle résume tout mieux que je ne saurais le faire ici :

Allez, il faut juste remettre l’ouvrage sur le métier (et d’ailleurs nous n’avons pas le choix)…

Bonne semaine

Laurent-David JOSPIN